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PPL visant à ouvrir le tiers-financement à l’état, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique.

M. Guy Benarroche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’été dernier, la Cour des comptes notait dans un référé l’incohérence et le risque d’inefficacité des mesures gouvernementales destinées à améliorer l’empreinte environnementale des bâtiments.

Ce même document rappelait que « le secteur du bâtiment, résidentiel et tertiaire, constitue en France la première source de consommation d’énergie » – à hauteur de 44 % –, et que « la politique de rénovation énergétique des bâtiments, à laquelle l’État a consacré plusieurs réformes législatives au cours de la dernière décennie, est un outil majeur pour la mise en œuvre de la stratégie [bas-carbone] ».

Le constat établi par la Cour en juillet dernier n’est pas nouveau. Oui, la rénovation énergétique est un outil majeur au service de la transition écologique.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires alerte depuis bien longtemps sur la problématique des passoires thermiques et les charges que ces dernières font peser sur de nombreux foyers modestes.

Pour autant, les bâtiments publics sont loin d’être épargnés par la surconsommation d’énergie. Dans les communes, les bâtiments de l’État et des collectivités locales sont responsables de 76 % de la consommation énergétique.

À Marseille, la municipalité a établi qu’une école publique sur trois était en situation préoccupante. Certaines écoles dépassent largement les seuils de consommation énergétique moyens, avec une surconsommation estimée à 20 000 mégawatts par an, soit la consommation électrique annuelle totale d’une ville de 7 000 habitants.

L’effort de rénovation des écoles, par exemple, a trop longtemps été repoussé. Les diverses échéances se rapprochant, les factures continuent de s’envoler, tandis que le coût du filet de sécurité – si utile – et des rénovations ne doit pas être pris à la légère.

Le patrimoine public subit la même double peine que les foyers. Le coût de la dette climatique est bien trop nocif pour notre société. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, le climat est un usurier et l’urgence est là.

La présente proposition de loi, que nous avons examinée selon la procédure de législation en commission, tente d’apporter une réponse aux difficultés entraînées par le coût très élevé des travaux nécessaires et prévoit l’expérimentation pendant cinq ans d’un aménagement du droit de la commande publique, en particulier en ce qui concerne le paiement différé.

Conscient de l’attente des collectivités et favorable à l’accélération de la transition énergétique des bâtiments publics, notre groupe est favorable à cette expérimentation, bien que certaines interrogations demeurent.

En effet, le risque d’une captation par le secteur privé d’une grande partie de la rentabilité des activités économiques engendrées par les économies d’énergie à la faveur d’une forme de privatisation de la maîtrise d’ouvrage de ces travaux et de leur financement est réel. Les partenariats public-privé, les fameux PPP, ont, hélas ! souvent été l’occasion d’abus de la part des partenaires privés.

Le marché de la rénovation thermique représentant une source de profit importante pour les entreprises, il paraît judicieux de bien s’interroger sur tout dispositif financier favorisant le recours à des acteurs privés plutôt que publics par la mise en œuvre de mécanismes encadrant la dépense publique. L’inertie des dernières décennies emporte déjà un coût. Il convient de s’assurer que celui-ci ne s’aggrave pas.

Au-delà de cette expérimentation, c’est bien la question du financement de la transition énergétique qui se pose. Je partage le constat de notre rapporteure à ce titre : si cette proposition de loi introduit un dispositif complémentaire bienvenu, celui-ci ne peut être l’unique solution pour réussir la transition énergétique du secteur public, d’autant qu’en raison des surcoûts qu’il emporte, le tiers-financement ne doit pas être favorisé de manière systématique.

J’espère que nous sommes nombreux sur ces travées, mes chers collègues, à défendre le principe du pollueur-payeur et partant, d’une taxation des entreprises les plus polluantes qui permettrait d’abonder le budget du dispositif MaPrimeRénov’ ou de tout autre dispositif visant à soutenir la rénovation énergétique des logements des particuliers.

L’expérimentation proposée dans ce texte reste une bonne idée. La véritable ambition d’évaluation de cette expérimentation, introduite par notre commission, s’impose au regard des sommes qui pourraient être engagées.

L’atteinte de l’objectif de réduction de 60 % de la consommation énergétique des bâtiments publics d’ici à 2050 ne sera pas possible sans des mécanismes d’accompagnement les plus pérennes et les moins coûteux possible.

Cette expérimentation permettra de dresser un bilan et d’évaluer les différents mécanismes afin de distinguer ceux qui fonctionnent de ceux qui ne fonctionnent pas.

Notre chambre des territoires connaît bien les difficultés auxquelles sont confrontées les collectivités. La crise énergétique et les discussions sur le filet de sécurité ont montré que ces difficultés étaient présentes partout, en milieu rural comme en milieu urbain, dans les petites collectivités comme dans celles de grande taille.

Cette proposition de loi n’apporte qu’une réponse très partielle aux ambitions qui doivent être les nôtres en matière de rénovation thermique et elle ne permettra pas, à elle seule, de les atteindre, mais elle va dans le bon sens.

Notre groupe la votera donc, mais il sera attentif aux possibles dérives auxquelles les marchés publics de rénovation peuvent donner lieu. Il continuera de travailler sur ce sujet prioritaire, notamment au travers de la commission d’enquête sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique, constituée à la demande de notre groupe et dont notre président Guillaume Gontard est rapporteur.

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