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Question écrite : Sécheresse et Agriculture

Question n° 07824 adressée à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire
Publiée le : 13/07/2023


Texte de la question : M. Guy Benarroche attire l’attention de M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire au sujet de la sécheresse. « Au nom d’une agriculture résiliente et compétitive, les agriculteurs doivent pouvoir accéder à tous les outils de production dont les solutions de protection des cultures ». C’est l’un des défis majeurs qui a été soulevé à l’aune du second quinquennat de Monsieur le Président Emmanuel Macron. Qu’en est-il aujourd’hui ? Au cours des dernières semaines, les averses orageuses en Provence ont eu un effet bénéfique sur la teneur en eau des sols superficiels. Cependant, ces fortes pluies n’ont pas réussi à recharger les nappes phréatiques, principales réserves d’eau potable : 68% soit deux tiers des nappes phréatiques restent à des niveaux modérément bas à très bas en France, et leurs niveaux devraient continuer à baisser au cours du prochain trimestre ce qui aggravera la situation de sécheresse. Actuellement, une quinzaine de départements en France sont en situation de « crise » sécheresse. Des incendies ont également commencé dans plusieurs régions. La préfecture des Bouches-du-Rhône a d’ailleurs fait passer en vigilance rouge cinq massifs afin de prévenir des dangers élevés de feux de forêt et de végétation. Face à cela, le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) prévoit de nouvelles restrictions d’eau dans les semaines à venir. Pour répondre aux conséquences de la sécheresse, le Parlement a adopté la loi n° 2022-298 du 2 mars 2022 d’orientation relative à une meilleure diffusion de l’assurance récolte en agriculture et portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture. Néanmoins s’il partage la volonté d’une plus grande protection, le Groupe Écologiste – Solidarité et Territoires (GEST) dont il fait partie a voté contre cette réforme. Les coûts d’assurance restent trop élevés pour la plupart des agriculteurs et ce système ne touche pas tout le monde comme cela était prévu. Pour les productions non-assurables (les pépinières, l’ostréiculture, l’apiculture, le maraîchage diversifié), le système sous-estime les pertes réelles. Aussi, ce nouveau dispositif de l’assurance récolte, au lieu de protéger les cultures diversifiées plus résilientes face aux aléas, tend à protéger la monoculture au travers d’un système de calcul incitant toujours davantage à l’accroissement des rendements ce qui ne correspond pas au modèle agricole souhaité par le groupe GEST. En 2022, l’autorité environnementale estimait notamment que l’assurance récolte pouvait avoir des impacts négatifs sur l’environnement en soutenant des systèmes d’exploitation fortement consommateurs d’intrants et qu’il était nécessaire d’évaluer son impact sur l’adaptation au changement climatique. Par conséquent, certains agriculteurs, notamment du département des Bouches-du-Rhône, sont inquiets et ne se sentent pas prêts à faire face aux catastrophes climatiques annoncées. Il est important de rappeler que ce département occupe la troisième place métropolitaine avec 29% des surfaces agricoles consacrées à l’agriculture biologique. Il est le premier producteur de fruits et de légumes dans la région. Il est également le premier producteur national de pêches (25 370 tonnes), de tomates (128 000 tonnes) ou encore de poires Guyot (22 780 tonnes). Il est donc clair que la préservation des surfaces agricoles irriguées et irrigables revêt un enjeu majeur pour le territoire, en termes d’économie agricole et d’autonomie alimentaire, dans un contexte d’adaptation au changement climatique qui devrait augmenter la fréquence des épisodes de sécheresse. Il lui demande alors si le ministère envisage, au-delà d’une amélioration nécessaire des règles de dédommagement pour pertes subies, de mettre en oeuvre un réel programme de transition de l’agriculture plus résiliente, plus résistante, dans les zones les plus touchées par la sécheresse.


Réponse de M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire
À publier le : 31/08/2023, page 5169


Texte de la réponse : L’agriculture est l’un des secteurs particulièrement exposés aux modifications hydrologiques, et il est important de réduire sa vulnérabilité à un risque accru de manque d’eau dans le contexte du changement climatique. Les conséquences de la sécheresse qui depuis plusieurs années touche de nombreux départements, dont le département des Bouches-du-Rhône en témoignent. Le Gouvernement est pleinement mobilisé et oeuvre en faveur des enjeux de gestion de l’eau et de disponibilité de l’eau, notamment à travers les travaux du Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique qui se sont achevés le 1er février 2022, actant un certain nombre d’actions à mettre en oeuvre collectivement afin d’anticiper les effets du changement climatique sur l’agriculture pour mieux la protéger et s’adapter. Plusieurs de ces actions concernent l’échelon territorial en lien avec l’irrigation et les spécificités locales. Notamment, les filières agricoles se sont toutes engagées à travers la signature d’une charte, à décliner des plans d’actions à conduire d’ici 2025 afin d’adapter toutes les exploitations et les entreprises et d’impliquer autant que possible les acteurs des territoires au coeur de la transition. D’un point de vue réglementaire, un additif à l’instruction relative à la mise en oeuvre des projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) du 7 mai 2019 a été publié le 17 janvier 2023. Il a comme objectif de faciliter la mise en oeuvre opérationnelle des PTGE, démarches soutenues par le Gouvernement qui visent à impliquer les usagers de l’eau (eau potable, agriculture, industries, navigation, énergie, pêches, usages récréatifs, etc.) d’un territoire dans un projet global en vue de faciliter la préservation et la gestion de la ressource en eau. Viendra s’y adosser un guide de mise en oeuvre des PTGE à destination des porteurs de projets, à paraître d’ici les prochaines semaines. Une délégation interministérielle chargée du suivi des conclusions du Varenne agricole de l’eau et de l’adaptation au changement climatique est opérationnelle depuis septembre 2022. Cette délégation a vocation à garantir la continuité de la dynamique du Varenne de l’eau, de coordonner et promouvoir l’action des services de l’État en faveur de l’adaptation des filières agricoles au changement climatique et d’une politique publique de l’eau en agriculture tout en veillant à associer l’ensemble des autres parties prenantes. Dans ce cadre, plusieurs dispositifs sont déployés et permettent d’accompagner financièrement les exploitations agricoles dont les dispositif d’aides aux agriculteurs, gérés par FranceAgriMer pour le financement d’outils d’aide à la décision en matière d’irrigation et de lutte contre la sécheresse : un guichet « Aide aux investissements pour l’acquisition de matériels en exploitations pour la protection contre les aléas climatiques » a été ouvert en février 2023, un guichet « Optimisation de la ressource en eau, adaptation aux changements climatiques et réduction de la consommation énergétique » a été ouvert en mars 2023. Enfin, l’appel à manifestation d’intérêt « Démonstrateurs territoriaux des transitions agricoles et alimentaires », doté de 152 millions d’euros (Meuros) sur cinq ans qui est destiné à des acteurs de territoire portant des projets innovations tant technologiques qu’organisationnelle, a été ouvert, dont la troisième et dernière relève a été fixée au 28 septembre 2023. De plus, le plan d’action pour une gestion résiliente et concertée de l’eau annoncé le 30 mars 2023 par le Président de la République intègre plusieurs mesures pour optimiser la disponibilité de la ressource en eau, y compris pour l’agriculture. En particulier, la mesure n° 1 prévoit que toutes les filières économiques, dont l’agriculture, établissent dès 2023 un plan de sobriété pour l’eau. La mesure n° 4 planifie que 30 M€ supplémentaires par an à partir de 2024 soient consacrés au soutien des pratiques agricoles économes en eau (émergence de filières peu consommatrices d’eau, irrigation au gouttes à gouttes, etc.). La mesure n° 21 prévoit qu’un fonds d’investissement hydraulique agricole soit abondé dès 2024 à hauteur de 30 M€ par an pour remobiliser et moderniser les ouvrages existants et développer de nouveaux projets dans le respect des équilibres des usages et des écosystèmes. Le plan prévoit également de massifier la valorisation des eaux non conventionnelles (REUT). Enfin, afin d’adapter et accompagner l’agriculture française face au changement climatique, l’État, en étroite concertation avec les régions et le monde agricole, a lancé le 7 décembre 2022 les travaux relatifs au pacte et à la loi d’orientation et d’avenir agricoles, destinés à assurer l’avenir de l’agriculture tout en accompagnant mieux le parcours de celles et ceux qui font le choix de s’engager dans les métiers agricoles. La concertation lancée s’est poursuivie tout au long du premier semestre 2023. Elle s’est déroulée au niveau national, pilotée par le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, en étroite association avec Régions de France, et au niveau régional, copilotée par l’État et les régions et mise en oeuvre par les chambres régionales d’agriculture. Cette concertation s’est articulée autour de quatre axes dont la transition et l’adaptation, en particulier face au changement climatique. Elle va prochainement aboutir à la rédaction d’un pacte et d’une loi d’orientation et d’avenir pour l’agriculture qui déterminera le cap à suivre et les outils opérationnels à déployer.

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