Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous retrouvons, en ce début de mandat – à tout le moins, pour certains d’entre vous – pour exercer un rôle essentiel de notre assemblée : la représentation des territoires.
De nombreux travaux de notre assemblée montrent le besoin d’un renouveau de la démocratie locale, le besoin de redonner aux élus locaux leur pouvoir d’agir dans de bonnes conditions, le besoin de conforter leur rôle essentiel de proximité auprès de nos concitoyens, et la nécessité de revitaliser l’engagement citoyen.
À ce titre, notre groupe a toujours activement soutenu les réflexions sur le sujet, et a aussi proposé des solutions permettant de désamorcer les tensions existant entre élus et citoyens qui, parfois, entraînent des dérives violentes inacceptables.
Notre groupe soutient l’action des élus locaux et s’associe à l’ensemble des propositions qui pourraient octroyer à ceux-ci une plus grande protection et un meilleur accompagnement dans leur engagement.
Ils sont souvent non indemnisés, ou peu indemnisés, et la nécessité de concilier leur mandat avec leur vie professionnelle et personnelle peut réduire le temps qu’ils peuvent consacrer à leur implication envers leur territoire.
Nous nous associons à la demande d’un réel statut de l’élu, plus protecteur, tout comme nous demandons le développement de moyens concrets d’accompagnement pour améliorer, par exemple, la parité et la diversité des profils : jeunes, femmes, parents, actifs, etc. La crise de confiance et la crise de l’engagement sont profondément liées.
La présente proposition de loi ne résoudra pas ces crises, mais nous l’accueillons avec grand intérêt, car elle a pour but de développer la protection fonctionnelle des élus. Nous sommes plus circonspects sur l’aggravation des peines encourues, qui ne saurait être une solution directe.
Vous le savez, les budgets de nos collectivités sont en souffrance : inflation, non-compensation, lisibilité pluriannuelle limitée, etc. C’est pourquoi nous saluons la volonté de permettre à l’État de compenser les coûts de couverture assurantielle liés à la protection fonctionnelle.
Les périodes de campagne électorale sont propices au déclenchement de violences. Il est donc bienvenu que ce texte permette aux candidats déclarés d’être couverts par le mécanisme de protection fonctionnelle.
Enfin, nous ne pouvons que soutenir les dispositifs liés à la facilitation des relations avec les acteurs judiciaires, et un équilibre nécessaire a été trouvé avec le dépaysement d’office des affaires dont l’élu serait le mis en cause.
Notre groupe proposera plusieurs améliorations à ce texte afin d’inclure les collaborateurs d’élus, souvent exposés aux mêmes agressions que ces derniers. Nous sommes attentifs à l’ensemble des territoires, et notre collègue Paulu Santu Parigi proposera d’adapter ces dispositions aux élus territoriaux de Corse – y compris au président du conseil exécutif de Corse et au président de l’Assemblée de Corse.
Nous saluons et soutenons de manière générale les mesures inscrites dans cette proposition de loi, d’autant qu’elles ont été améliorées en commission, grâce au travail de la rapporteure.
Pour autant, nous sommes très attentifs à ce que ce renforcement de la protection des élus ne puisse être perçu comme une mesure inéquitable, accroissant le fossé entre élus et citoyens.
Il est essentiel d’encourager et accompagner les dépôts de plainte pour violences envers les élus, car il est essentiel d’encourager et d’accompagner les dépôts de plainte pour l’ensemble des violences, qu’il s’agisse de violences au travail, de violences sexistes, sexuelles ou autres.
Nous devons continuer à nous interroger et à lutter contre le sentiment d’être perdu face au parcours du combattant qu’impose la judiciarisation des actes subis par les victimes.
Nous sommes très attentifs à ce qu’en aucun cas il ne paraisse y avoir une justice à deux vitesses, et continuerons, notamment lors des discussions budgétaires, à prôner un réel renforcement du service public qu’est la justice et une meilleure utilisation des moyens en ce sens.
Je tiens de nouveau à saluer l’action des élus locaux, si souvent « à portée de baffes », comme l’a dit François-Noël Buffet, et qui tentent d’agir au quotidien.
Mais nous ne sommes pas dupes : ces violences contre les élus, aussi inacceptables et injustifiables soient-elles, s’inscrivent dans la perception d’un fossé entre la politique et le citoyen, la fin de la croyance d’une gouvernance pour l’intérêt commun, le sentiment accru d’une déconnexion entre la volonté citoyenne et l’action du politique, entre la vie au quotidien et notre capacité à la modifier.
La montée des violences trouvera aussi une réponse au travers d’un développement plus important de la démocratie locale. Attelons-nous ensemble à imaginer et initier des référendums citoyens, des budgets citoyens, des implications citoyennes bien en amont des décisions.
Alors que s’ouvrira sous peu la discussion sur le projet de loi Immigration, comment ne pas évoquer les intimidations, menaces et violences subies par les élus de Callac et de Saint-Brevin-les-Pins à propos de l’accueil des réfugiés ?
L’arrivée de plus en plus d’élus issus du mouvement écologiste montre que ces derniers ne sont pas moins la cible de menaces et de violences que d’autres. Ainsi, un communiqué officiel d’une chambre d’agriculture comportait la phrase « Ne venez pas chez nous, ça va mal se passer », adressée à la secrétaire générale du parti Europe Écologie – Les Verts, Marine Tondelier.
Pour toutes ces raisons, et conscient des risques et limites de cette proposition de loi, notre groupe, espérant pouvoir améliorer encore plus un texte nécessaire, la votera.